monotone press est un site gratuit de visualisation, de diffusion et d’édition en ligne.
À partir du moment où un objet devient un fichier numérique, n’importe quel support numérique est apte à le diffuser.
Ce qu’offre la discrétisation, ce n’est pas tant de nouvelles formes d’images ou de sons (puisque le numérique calque souvent ses formes sur d’anciennes formes de présentation ou de représentation), c’est surtout une extraordinaire capacité à faire circuler des objets à rematérialiser.
Toute technique nouvelle entraîne des objets et des procédures, qui sans elle, étaient impensables, le plus difficile étant de se défaire des habitudes induites des objets précédents.
Jusque-là une œuvre de l’esprit avait nécessairement un support physique fixe et le droit d’auteur protégeait l’originalité d’une idée grâce à l’originalité de son inscription dans une forme. Les deux étaient inséparables.
Avec l’objet numérique, nous sommes en face d’une séparation du code et des différents supports qui peuvent l’accueillir.
Pour profiter d’un objet numérique, il faut le réactiver.
Si au début du XXe siècle c’était encore la reproduction d’un objet qui provoquait sa consommation, aujourd’hui c’est le désir de consommation d’un objet qui va provoquer sa reproduction : pour consommer il faut reproduire.
Pourtant, alors que le téléchargement ne prive personne, alors qu’il n’enlève aucun objet, puisqu’au contraire il n’arrête pas de le re-produire, l’industrie essaie de nous faire croire qu’il y a vol là où rien n’a disparu. D’un côté elle organise la consommation, en vendant toutes les machines permettant la reproduction des œuvres, et de l’autre elle limite juridiquement et techniquement la prolifération que ces mêmes techniques autorisent. De plus, en s’accaparant le débat sur le droit d’auteur, elle cherche à faire admettre la pénurie qu’elle organise et dont elle essaie de tirer le profit maximum.
Mais la question que pose le numérique reste entière : comment penser l’économie d’un objet si sa consommation n’est plus son épuisement mais sa prolifération illimitée ?
L’industrie de la subjectivité, tout en participant plus qu’activement à l’appauvrissement de l’offre, essaie de nous faire croire exactement le contraire. Elle prétend qu’elle participe, qu’elle organise et qu’elle sauve la diversité des subjectivités, mais nous savons bien que c’est faux. C’est une fiction de l’industrie elle-même.
Pourquoi l’industrie devrait-elle interdire le piratage de mauvais produits culturels puisque ces produits participent à la création même d’un marché et d’une subjectivité mondiale, globale et monolithique dont elle tire tout son profit ? Pour cette simple raison : pour entretenir le mythe d’une création artistique libre, riche et diversifiée tout en la fracassant. Pour nous faire croire qu’elle vend de l’art là où elle fabrique des produits financiers.
Ce qu’Hadopi (c’est-à-dire ce que l’industrie culturelle via Hadopi) ne veut pas, c’est le cinéma sans l’industrie du cinéma, l’édition sans l’industrie de l’édition, la musique sans l’industrie de la musique.
Ce qui est menacé par le numérique ce n’est pas l’art, c’est l’industrie de l’art telle qu’elle existe aujourd’hui. C’est-à-dire telle qu’elle domine notre subjectivité.
Une fois de plus ce qu’on essaie de nous voler c’est notre liberté possible.
Si ce qui caractérise le numérique, c’est la séparation définitive du contenu et des supports, nous devons bien conclure que les contenus, pour profiter à tous, doivent rester libres, absolument. Que seul les singularisations de ces contenus peuvent devenir des objets spécifiques et donc propriétaires, ou privateurs comme dirait Richard Stallman. Et que seul ces objets rendus spécifiquement privateurs (du fait de leur actualisation sur un support matériel par exemple) peuvent faire l’objet d’un commerce (si on veut faire du commerce).
Nous devons alors imaginer une économie nouvelle où les objets sont totalement disponibles et où, dans un même temps, ils peuvent faire l’objet de matérialisations toujours singulières et toujours illimitées.
Nous devons aussi admettre que cette économie d’abondance immatérielle inappropriable est très exactement, et dans le même temps, une économie d’appropriations successives non exclusives.
Ainsi, pour que les choses soient tout à fait claires, il est apparu nécessaire de créer une structure autonome de diffusion de contenus, dans laquelle n’importe qui peut aller chercher de quoi réaliser ce qui l’intéresse (si ça l’intéresse) : livres, affiches, cartes et autres objets imprimés.
Cette structure c’est monotone press.
monotone press est placé sous le régime du droit français. C’est-à-dire sous le régime du droit moral. Il n’y en a pas de supérieur.
Tous les autres droits (copyright, copyleft, creative commons) ne sont que des appauvrissements du droit moral.
Quelque soit sa forme, le droit anglo-saxon reste un droit de l’objet et jamais un droit de l’auteur.
En droit français : « l’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. »
Le droit français ne conçoit pas de séparation entre un auteur et ce qu’il fait. Ce qu’il fait est inséparable de qui il est.
Dans ce cadre, le droit moral est un droit dont le degré de liberté ne dépend que de l’auteur. Il peut être totalitaire ou totalement libre. Il peut être totalitaire pour certains et libre pour tous les autres.
Le droit moral détermine donc le rapport économique, politique et social que l’auteur peut entretenir avec son public.
Alors pourquoi décider à priori de ce qu’on peut faire ou ne pas faire avec monotone press ? Il vaut mieux décider à posteriori. A priori tout est permis. On verra bien si une utilisation apparaît plus tard scandaleuse ou malhonnête.
Vous pouvez donc faire tout ce qu’il vous plaira de monotone press (sauf ce qui ne plait pas).